57e session / 23 – 26 septembre 2024

Retrouvez le programme complet en ligne !

Avec Léonora Miano, Sylvie Perez, Olivier Roy et Éric Fottorino

Depuis longtemps, le concept anthropologique et juridique d’identité désigne le caractère de ce qui est invariable, comme l’identité personnelle (1756). Mais depuis quatre ou cinq décennies, se confirme et se développe un mouvement d’individualisation (extrême) de nos sociétés. Dans ce moment du « radicalisme individuel », il devient complexe de réduire l’identité aux universelles et habituelles règles juridiques du droit ou de la police des gens. Pour une personne, il s’agit là d’être un individu donné et de pouvoir être reconnu ou d’être identifié comme tel de la naissance à la mort. Or, les institutions traditionnelles semblent avoir perdu leur force intégrative de configuration et de façonnage identitaires.

En conséquence, les identités versatiles actuelles ne sont-elles pas en train d’énoncer des sphères normatives, autant disparates qu’inédites ? S’y agrègent pêle-mêle des ingrédients sociaux, politiques, religieux, territoriaux, culturels, voire biologiques. S’y ajoutent aussi des expériences d’intimité et des modes de subjectivité qui radicalisent la tyrannie des micro-identités jusque sur l’espace public. Entre l’un ou l’autre de ces apports, l’instance identitaire semble dessiner de nouvelles hiérarchies de valeurs et d’inattendues directives en gommant des configurations d’universalité. Celles notamment de l’identité politique, juridique ou civique dans l’héritage du contrat social selon les Lumières.

Au prisme de nouveaux seuils du sensible ou du tolérable, dans la culture subjectiviste dominante, comment penser dans une collectivité les identités d’aujourd’hui – naviguant entre l’ethnicité, l’intersectionnalité, les déclinaisons du genre, l’inclusivité, le communautarisme, le wokisme, etc. ? Reste surtout ouvert le problème de « l’identité démocratique » dans un monde malmené où l’autoritarisme et le populisme en contestent l’héritage, en dénigrent la culture politique, en minent les usages contemporains dans l’État de droit.

Michel Porret
Président des Rencontres internationales de Genève

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Affiche RIG 2024
« Identités d’aujourd’hui »
Graphisme : Chris Gautschi

Retrouvez les conférences d’Aurélien Barrau et de Marion Muller-Colard en ligne !

26 septembre 2023
Conférence d’Aurélien Barrau – « Catastrophe écologique : état du monde et perspectives »
Suivie de Regards croisés avec Antonio Hodgers (Conseiller d’État du Canton de Genève), Valentine Python (climatologue) et Stéphane Berthet (UNIGE/RIG).
Clôture avec un concert du Trio Circle Dance.

27 septembre 2023
Conférence de Marion Muller-Colard – « Quand il n’y a plus de dieux auxquels se plaindre. Mal et malheur peuvent-ils s’affranchir de leur lecture religieuse ? »
Suivie de Regards croisés avec Youri Volokhine (UNIGE), Daniel Halpérin (RIG) et Rainer Michael Mason (RIG).

56e session / 26 – 27 septembre 2023

Retrouvez le programme complet en ligne !

Avec Aurélien Barrau et Marion Muller-Colard.

En 2023, ne peut-on évaluer le futur que sous la forme désespérée et dystopique du pire des mondes possibles ? Guerre impérialiste du président W. Poutine en Ukraine, militarisme qui enfle journellement, surchauffe climatique où se nouent d’innombrables tragédies : tout pèse sur l’avenir. Tout semble le ramener au mal. Le monde de demain – celui de nos enfants, celui où les glaciers ancestraux de l’Himalaya ne seront que des vestiges, celui de l’illibéralisme et du populisme autoritaires, celui où des hordes de déracinés sans espoir affronteront le struggle for life des nantis – est empli d’incertitudes sociales, géopolitiques et écologiques.
Fidèles à l’humanisme critique où s’enracinent les Rencontres internationales de Genève, nous devons pourtant formuler des espérances de transition pour le meilleur des mondes possibles. Tirons des salves d’espoir pour raviver le goût des Lumières.
Comment renouer avec le paradigme, voire le récit décrié, de l’« histoire-progrès » ? Ce concept est-il encore acceptable ? Quels sont les termes du nouveau contrat social en démocratie ? Comment ne pas désenchanter les générations montantes ? Celles en désarroi. Celles qu’écrasent le présentisme de la catastrophe annoncée, des réseaux sociaux qui minent la fermeté de la pensée et des savoirs constitués. Celles de l’individualisme et du radicalisme identitaire. Parmi d’autres, de vaines questions ? Ou alors, les voies complexes pour tenter de… reconstruire le bien.

Michel Porret
Président des Rencontres internationales de Genève

RIG-affiche-2023-Reconstruire le bien-Chris-Gautschi

Affiche RIG 2023
« Reconstruire le bien »
Graphisme : Chris Gautschi

55e session / 26 – 29 septembre 2022

Retrouvez le programme complet en ligne !

Avec Ivan Krastev, Anne Nivat, Antonio Scurati et Barbara Stiegler.

Le ressentiment amalgame la rancune et l’animosité envers ce qui est désigné comme la source d’un préjudice, d’un mal subi, d’une humiliation réelle ou ressentie, d’une injustice. Au plan individuel, le ressentiment embrase la jalousie et les conflits, affermit l’agressivité, décuple la haine. Collectivement, le ressentiment attise les griefs contre les institutions, le régime politique, les étrangers identifiés à l’altérité inassimilable. Des prophètes populistes et des dirigeants messianiques instrumentalisent le ressentiment pour mobiliser les foules dans l’intolérance confessionnelle, la revanche politique contre les « privilégiés », la dénonciation de « boucs-émissaires », la brutalisation sociale, le nationalisme belliciste, la xénophobie, le durcissement identitaire.
Guerres de religion, révolutions, régimes autoritaires et totalitaires, conflits mondiaux, Shoah : maintes fois, le ressentiment a mis le monde au bord de l’« apocalypse » et du « désapprentissage de la civilisation » comme l’illustrent au XXe siècle, après la saignée de la Grande guerre, la « révolution » fasciste en Italie, le stalinisme, le joug antisémite du nazisme exterminateur, les effrayantes guerres coloniales.
Désarroi politique et social, émotion individuelle et émoi collectif : l’assemblage de griefs antilibéraux instaure aujourd’hui l’offensive autoritaire contre la modernité démocratique héritée des Lumières et les droits individuels dans la vie privée. Comment saisir autrement le tournant conservateur de la Cour suprême qui « attaque les piliers progressistes des États-Unis » ? Quel périmètre au ressentiment anti-démocratique dans la guerre Russe en Ukraine ?
À l’orée d’un monde globalisé empli de nouveaux périls militaires, antilibéraux, climatiques et pandémiques, comment la démocratie peut-elle combattre la culture politique du ressentiment qui la sape ?

Michel Porret
Président des Rencontres internationales de Genève

RIG-affiche-2022-Ressentiment-Chris-Gautschi

Affiche RIG 2022
« Ressentiment. Périls et espoirs démocratiques »
Graphisme : Chris Gautschi

RETROUVEZ EN LIGNE LES CONFÉRENCES DES RIG !

Session de septembre 2021 « Embellie ? »

Lundi 27 septembre – 18h30

Conférence de Krzysztof Warlikowski « Croyez-vous aux fantômes? »


Mercredi 29 septembre – 18h30

Regards croisés avec Patrick Chappatte, Hélène Becquelin et Mirjana Farkas « Le monde imagé »


Retrouvez sur notre chaîne YouTube toutes les conférences de nos sessions de septembre !


Session de septembre 2020 « Femmes – Hommes : nouveaux rapports ? »
Conférence du 23 septembre 2020
« Les nouveaux enjeux d’une justice de l’intime »
par Antoine Garapon, essayiste et magistrat français

suivie de Regards croisés avec Anne-Laure Huber (première procureure, Canton de Genève) et Michel Porret (président des RIG)

Conférence du 24 septembre 2020
« Femmes et espace public : intrusion ou conquête ? Algérie 2020 »
par Fatma Oussedik, sociologue et militante féministe algérienne

suivie de Regards croisés avec Cristina Ferreira (HESAV) et Laure Zhang (UNIGE)

Conférence du 25 septembre 2020
« Hommes/Femmes : un destin partagé »
par Belinda Cannone, romancière et essayiste française

suivie de Regards croisés avec Marie Hasse (Editions Metropolis) et Rainer M. Mason (historien de l’art et conservateur)

Benoît Melançon, « Un intellectuel en temps de pandémie »

En attendant notre prochaine session qui se tiendra du 22 au 25 septembre 2020, découvrez les nouvelles capsules vidéos des Rencontres internationales de Genève !

Merci à Benoît Melançon pour cette première capsule réalisée en confinement à Montréal et intitulée « Un intellectuel en temps de pandémie ». Une conférence en cinq chapitres (écouter/lire/écrire/enseigner/interpréter) pour répondre à la question : « Que peut faire, que doit faire un intellectuel devant des événements tels que l’apparition de la COVID-19 ? »

Pour plus de vidéos, abonnez-vous à notre chaîne YouTube !

Découvrez les publications de la collection « Achevé d’imprimer »

Depuis 2016, les textes des intervenants ayant participé aux sessions des Rencontres internationales de Genève sont compilés dans des publications de la collection Achevé d’imprimer (Editions Georg).

2016 « Fictions : penser le monde par la littérature« 

Fictions-Rencontres-internationales-Genève-2016-publication

Erri De Luca
La chute comme expérience du salut

Petros Markaris
Aller ailleurs et regarder ailleurs

Kim Thuy
La fiction, une réalité sans frontières

Boualem Sansal
Ecrire dans la violence du monde

Liminaire par Michel Porret


2017 « Résister, écrire, imaginer« 
Résister-Ecrire-Imaginer-Rencontres-internationales-Genève-2017-publication

Préambule par Michel Porret
L’imagination en majesté

Patrizia Lombardo
Alberto Manguel : un écrivain qui aime les livres

Alberto Manguel
La méthode de Schéhérazade ou les pouvoirs de la fiction

Alberto Manguel
Les enfants de Schéhérazade ou les devoirs de la fiction

Bahiyyih Nakhjavani
Résister, écrire, imaginer : réponse à la méthode de Schéhérazade


2018 « Exils et refuges« 
Exils-et-refuges-Rencontres-internationales-Genève-2018-publication

Liminaire par Michel Porret
La nation des exilés

Michel Agier
Hospitalité et cosmopolitique

Akira Mizubayashi
Vivre en exilé linguistique, aller au-delà des limites de son monde

Catherine Wihtol de Wenden
Hommes et migrations, crise des migrations ou crise des politiques d’asile et leurs effets sur les territoires d’accueil

George Nivat, Hommage à Jean Starobinski

Vincent Monnet, Jean Starobinski quitte la beauté du monde

Charles Kleiber, « HAÏR – sur les chemins de la haine »

Quand les gens ne se sentent ni protégés ni reconnus, quand les anciennes promesses ne sont pas tenues, un cycle mortel prend forme, une frustration collective étend son ombre sur toute la société.

Où allons-nous ? Qui croire ? Sur qui compter ?

On ne se reconnaît plus dans les institutions. L’incertitude empoisonne l’avenir, la confiance irrémédiablement se perd. On cherche des boucs émissaires. On les trouve : les vieilles figures du mal qui permettent de simplifier le monde, les immigrés, les homosexuels, les élites, le système, le capitalisme, la mondialisation, tous prêtent leur visage au ressentiment. La peur d’être parmi les perdants rôde, la haine circule.

Nous en sommes là.

« HAÏR », un documentaire de Charles Kleiber et Kostas Makrinos, 2021. Production : ADN / Association Disputons-Nous.


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27 et 29 septembre 2021 « Embellie ? »

Retrouvez le programme complet en ligne !

Avec Krzysztof Warlikowski, Anne Bisang, Izabella Pluta, Eric Eigenmann, Patrick Chappatte, Hélène Becquelin et Mirjana Farkas.

Suivez les conférences en ligne !

L’embellie est l’amélioration momentanée du temps météorologique après la bourrasque, la trombe d’eau ou le coup de vent opiniâtre. La retombée du vent accompagne l’éclaircie. Le navire attend l’embellie pour passer la barre. Est-elle d’actualité ? Aujourd’hui, l’ouragan semble perpétuel. Des États-Unis à la Méditerranée, la planète flambe. Dans le raffermissement inexorable du mal et du désordre climatique, après l’épreuve du terrorisme de masse, les milliers d’hectares de vie qui crépitent alourdissent la quatrième vague pandémique et la tragédie des réfugié·e·s que le désespoir déracine. Ce passé spectral et ce présent de la catastrophe permettront-ils de repenser l’avenir pour le sauver ?

Dans l’attente d’une embellie durable, celle plus brève des Rencontres internationales de Genève reste depuis un demi-siècle un lieu public de pensée humaniste et d’échanges intellectuels. Moins étalage d’érudition et de savoirs détachés du réel que posture collective ou individuelle de sa transformation pour un monde meilleur, la culture écrite, visuelle et plastique offre les conditions renouvelées d’embellie intime, existentielle et sociale. Entre passé et présent, le salut est là.

Or, « il y a beaucoup à faire » selon notre invité Krzysztof Warlikowski, metteur en scène polonais de théâtre et d’opéra, directeur du Nowy Teatr de Varsovie qu’il a fondé en 2008. Depuis une vingtaine d’année, élève de Krystian Lupa et ancien assistant de Peter Brook, Krzysztof Warlikowski, refonde le langage théâtral dans le prisme contemporain des cultures visuelles du cinéma et de la vidéo. Sans « papotages sur l’espoir », ancrée dans l’imaginaire social du désenchantement et de l’amnésie culturelle, son œuvre de la fulgurance et de l’inquiétude réverbère et sollicite la société contemporaine qui « triche » et qui ne « veut plus penser » alors que l’Europe est hantée par les spectres de son histoire la plus sombre (« On s’en va », entretien avec Krzysztof Warlikowski, Théâtre de Chaillot, 10 avril 2019).

Hic et nunc : il s’agit pourtant de « rester » attentif dans le travail libérateur de la pensée et de la création que prennent aussi les formes visuelles du dessin de presse selon Patrick Chappatte et de la bande dessinée selon Hélène Becquelin. Depuis la fin du XIXe siècle au moins, à l’instar des arts plastiques, de la musique, de la littérature, du théâtre, de l’opéra et du cinéma, ce langage contemporain de nos deux autres invités reste bien en prise avec le réel comme l’a montré la tragédie de Charlie Hebdo (7 janvier 2015). Entre deux embellies, dans le foisonnement universel des cultures urbaines les plus diverses et les plus cosmopolites, reste béante la « question du bien qui ne sera jamais résolue » (Alex Kahn, Et le Bien dans tout ça ?, Paris, Stock, 2021, p. 354). Avec la cité, avec nos invités, nous nous réjouissons de partager le temps vespéral d’une belle et fraternelle embellie intellectuelle.

Michel Porret
Président des Rencontres internationales de Genève

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Affiche RIG 2021
« Embellie ? »
Graphisme : Chris Gautschi & Dennis Moya

Xavier Tabet, « Discours du virus et biopolitique »

Au moment où la France est reconfinée, retrouvez la conférence de Xavier Tabet (professeur à l’Université Paris 8) qui revenait, en juillet dernier, sur notre printemps confiné, en l’abordant dans le sens d’un « moment biopolitique », moment d’affirmation d’une politique de la vie, d’un gouvernement qui a le vivant pour objet et les vivants pour sujets.

À la lumière des enseignements foucaldiens sur la biopolitique, Xavier Tabet développe l’idée selon laquelle la crise que nous traversons nous montre combien la vie –  le « droit à la vie » – est devenu l’enjeu des luttes politiques contemporaines. Les questions fondamentales de la sécurité, de la régulation, du contrôle et de la discipline sont au centre de la réflexion qu’il porte sur nos États contemporains.


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22-25 sept. 2020 « Femmes-Hommes : nouveaux rapports ? »

Femmes et hommes, hommes et femmes : ordre alphabétique ? ordre habituel du monde « patriarcal » ? On choisira selon son goût, sa sensibilité, sa foi, son idéologie ou son idéal politique. L’agencement des mots réverbère les choses en ébauchant les imaginaires sociaux et les « idées-images » des représentations. Or, l’égalité « femmes/hommes – hommes/femmes » est présentement à l’agenda politico-économique mais aussi juridique avec le double enjeu des parités salariale et professionnelle. Les militant·e·s, l’État social-démocrate, les institutions, les intellectuel·le·s, les individus et l’opinion reconsidèrent les rôles dans le prisme du genre, soit l’ensemble des fonctions sociales jouées par la femme et l’homme, tout particulièrement autour de la sexualité conjugale longtemps soumise à la stricte reproduction biologique de la famille qui prohibait la « paillardise » soit le rapport sexuel hors du lien matrimonial.

Aujourd’hui, comme dans un jeu de cartes où le roi de chaque couleur l’emporte toujours sur la reine de chaque coloration, se noue le dessein complexe de redistribuer celles des femmes et celles des hommes. Rebattre sur table les cartes des rôles sociaux afin de mitiger les dominations concrètes et symboliques entre les sexes. Mais aussi pour infléchir les tutelles matérielles ou morales visibles. Ainsi que les invisibles, tout aussi puissantes, à l’instar des préjugés moraux, des interdits religieux, des normes juridiques et de l’habitus social. Dorénavant, l’assassinat des femmes est requalifié de « féminicide ». En résulte la motivation morale du reflux controversé de la prescription pénale, dans la même logique de rétribution du viol ou encore du massacre des enfants par les adultes dévoyés qui reproduisent l’amalgame entre désir et puissance du mal.

Volontarisme juridique, éducation et contrat social : cela suffit-il pour contenir les normes discriminatoires fondées durablement sur le sexe dans l’héritage bourgeois des sociétés traditionnelles d’avant l’État libéral et démocratique qui peine à s’en dissocier ? Semblable à l’éradication planétaire de la pauvreté ou à la généralisation du revenu universel, émerge peut-être une autre « utopie réaliste », celle de l’égalité genrée (Rutger Bregman, Utopies réalistes, Seuil, 2017).

Au temps des « nouvelles radicalités féministes » (#MeToo, #NiUnaMenos, #TimesU, #UnVioladorEnTuCamino) la contestation constitutive et émotionnelle du patriarcat culmine, tout autour de la planète, dans les manifestations spectaculaires et parfois d’inversion carnavalesque pour les droits des femmes ou contre l’impunité de la prédation sexuelle des mâles comme dispositif suprématiste. Si ce contexte évoque les « révoltes logiques » des années 1970, la session des RIG de septembre 2020 sondera et évoquera le bouleversement des rapports ordinaires entre les deux sexes, singulièrement complexes dans le cadre confessionnel des sociétés non sécularisées.

Maillon fort de la démocratie universitaire, les sciences humaines permettent de donner du sens aux faits. Le mieux possible selon les questions du temps présent, la déontologie herméneutique et l’esprit critique que réverbèrent les Rencontres internationales de Genève. De plus, les sciences humaines fournissent l’outillage conceptuel pour décoder l’univers mental des représentations sociales conservatrices ou inauguratrices. L’histoire, la sociologie, le droit ainsi que la littérature questionnent les liaisons anthropologiques et politiques des deux sexes entre domination, égalité et énoncé du désir.

Femmes et hommes, nouveaux rapports ? : autour de la dialectique genrée, la conversation publique que mèneront Belinda Cannone, Antoine Garapon, Eva Illouz et Fatma Oussedik entrouvre une fenêtre sur le monde sensible de demain. Outre l’évolution statistique de la parité institutionnelle ou salariale, de quelle manière doit-on envisager la perfectible mutation socio-culturelle des normes, des pratiques, des représentations et des seuils de tolérance entre les humains des deux sexes sans gommer l’empire du droit ni la différence ontologique et parfois orageuse qui les unit ? Trop oubliée, l’écrivaine suédoise Karin Boye (1900-1941) pointe l’énergie tyrannique du naturalisme égalitaire dans le chef d’œuvre dystopique La Kallocaïne, autopsie lucide du totalitarisme panoptical et hallucinatoire de l’« État mondial » (1941, Éditions Ombres, 2014).

En 2020, fidèle au libéralisme juridique des Lumières, la grande question politique de la démocratie reste peut-être celle du nécessaire mais fortuit changement des rapports humains et des liens sociaux entre les femmes et les hommes. Dont ceux funestes du machisme ordinaire et de la « domination masculine » (Pierre Bourdieu) que les poignantes Thelma et Louise tentent de contrer au prix de la vie dans le road-movie féminin/féministe Thelma & Louise (1991) de Ridley Scott projeté durant la session de cette année avec Jusqu’à la garde de Xavier Legrand (2017) sur le dilemme insoluble de la garde partagée ou exclusive des enfants de couples déchirés.

Or, sur l’horizon d’attente de l’existence, reste vivace l’irréductible désir demeuré désir. Dans la liesse séductrice de loyaux ennemis ou alliés entrelacés se noue et se dénoue le pacte amoureux toujours recommencé : « C’était au début d’adorables années. La terre nous aimait un peu je me souviens » (René Char, « Évadé », Seuls demeurent, 1938-1944). La reine de cœur doit- elle une fois l’emporter sur le roi de cœur ?

Michel Porret
Président des Rencontres internationales de Genève

Retrouvez le programme complet en ligne !

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RIG-affiche-2020-femmes-hommes-Chris-Gautschi

Affiche RIG 2020
« Femmes-Hommes : nouveaux rapports ? »
Graphisme : Chris Gautschi